CORRESPONDANCES

Bernard Noël (Sainte-Geneviève-sur-Argence, Aveyron, 19 novembre 1930) écrivain et poète français. Grand Prix national de Poésie 1992.

Son amitié pour les peintres et son goût pour la peinture le conduisent à collaborer à la réalisation de nombreux livres d'artiste.

Les événements qui l'ont marqué sont ceux qui ont marqué sa génération : explosion de la première bombe atomique, découverte des camps d'extermination, guerre du Vietnam, découverte des crimes de Staline, guerre de Corée, guerre d'Algérie... Ces événements portaient à croire qu'il n'y aurait plus d'avenir. D'où un long silence, comme authentifié par un seul livre, 'Extraits du corps' en 1958. 'Pourquoi je n'écris pas ? ' est la question sans réponse précise qui équilibre cette autre : 'Pourquoi j'écris ? ' devenue son contraire depuis 1969. Depuis la parution en 1971 du 'Château de Cène', le nom de Bernard Noël est attaché à une écriture du corps, qui, entre la mort et l'érotisme, essaie de dénouer le fil du visible. Chez Bernard Noël, 'la peau et les mots' sont un seul et même tissu. La résonance de son oeuvre tient sans doute aussi au fait que tout s'assemble dans un même mouvement créatif : le poète (Prix National de Poésie en 1992) , le romancier, l'essayiste, le politique, l'historien, le critique d'art. La figure impressionnante d'un écrivain qui pense sa propre histoire dans celle du monde qui l'entoure, qui réussit à faire coïncider le réel et l'imaginaire dans son être même.

Olivier Debré, né le 14 avril 1920 à Paris et décédé le 2 juin 1999 à Paris, était un peintre français et membre de l'Institut.

Abstraite et solidement construite dans les années 1940-1950, sa peinture a évolué à partir des années 1960 vers une spatialité qui renvoie à la liberté et à l'impermanence de la nature. Son intervention sur l'espace pictural exalte la couleur, il est un grand coloriste.

Après des études d'architecture à Paris (dans l'atelier de Charles Lemaresquier) et d'histoire, il devient, en 1939, l'élève de Le Corbusier.

A la Libération, il rencontre des peintres avant-gardistes tels que Serge Poliakoff, de Stael, Soulages.

Dans les années 1950-55, on retrouve les grands " signes personnages " dans les dessins à l’encre. Vers 1960, son œuvre prend un tournant certainement suite à ses rencontre aux Etats Unis avec les maîtres de l’expressionnisme abstrait (Kline, Rothko, Olitski).Debré a parfois peint de très grandes toiles (en faisant glisser une sorte de pinceau-balai sur la toile au sol). Il a dessiné également un timbre-poste, des vitraux, peint plusieurs rideaux de scène, pour la Comédie-Française, pour l'Opéra de Hongkong et le nouvel Opéra de Shanghai en Chine, ainsi que les fresques murales du Théâtre des Abbesses à Paris.

Il représente la France à l'exposition Universelle de Montréal en 1967.

De 1980 à 1985, il enseigne à l'École nationale supérieure des Beaux-arts de Paris.

Il a aussi été sculpteur et illustrateur, entre autres des livres de Michel Déon, Francis Ponge et Julien Gracq. Il a publié quelques essais artistiques, notamment pour donner sa vision de l'évolution des formes et proposé une nouvelle architecture adapté à la ville contemporaine.

Olivier Debré était le frère de Michel Debré, voir l'article sur la famille Debré

(source Wikipédia)





LETTRE DE MICHEL SEUPHOR DU 19 MAI 1993

Biographie

Michel SEUPHOR, né en 1901 à Anvers, a réalisé, depuis les années 20 jusqu’à sa disparition en 1999, une œuvre importante, aussi bien dans le domaine de la littérature, de la poésie, de la critique d'art que dans celui des arts plastiques.

Il a fréquenté la plupart des grands artistes de la première moitié du siècle : Mondrian, Arp, Sophie Taeuber, Vantongerloo, Torrès-Garcia, Delaunay, Léger, Ozenfant, Gleize, Brancusi, Picasso, Moholy-Nagy, Peeters, Marinetti, Gropius, Kandinsky...

Tout jeune, encore au lycée, Michel Seuphor entreprend l'édition de revues d'avant-garde plutôt confidentielles mais qui comptent, maintenant, parmi les plus importantes en ce qui concerne la poésie et les arts plastiques du début de ce siècle : « Het Overzicht » à Anvers, «Les Documents Internationaux de l’Esprit nouveau » et « Cercle et Carré » à Paris.

Avec Torrès-Garcia il fonde, en 1930, le premier groupe d’artistes essentiellement constructivistes «Cercle et Carré », groupe qui éditera plusieurs numéros de la revue du même nom et organisera une mémorable exposition montrant, pour la première fois, un ensemble d’œuvres des artistes parmi les plus importants de cette époque : Arp, Baumeister, Buchheister, Marcelle Cahn, Charchourne, Exter, Gorin, Huszar, Kandinsky, Le Corbusier, Léger, Mondrian, Erik Olson, Ozenfant, Pevsner, Prampolini, Russolo, Sartoris, Schwitters, Stazewski, Taeuber-Arp, Torrès-Garcia, Vordemberge-Gildewart, Vantongerloo, Werkman... En 1931, le groupe « Abstraction-Création » reprendra les idées de « Cercle et Carré ».

De 1934 à 1948, Michel Seuphor et sa famille s'établissent dans le Midi de la France. Cette période se caractérise par une importante activité littéraire. Poèmes, romans, essais, écrits sur l'art voient le jour. De retour à Paris, en 1948, il organise de nombreuses expositions d'art contemporain et écrit, en particulier, le premier ouvrage d'importance consacré à l'art abstrait : "L'art abstrait, ses origines, ses premiers maîtres ». A New-York, il rencontre, en 1950, les principaux artistes américains d'avant-garde qu’il est certainement un des premiers, si ce n’est le premier, à dévoiler en Europe : Pollock, De Kooning, Rothko, Kline, Motherwell, Marcel Duchamp, Still ...

1954 voit la première exposition de ses dessins à la Galerie Berggruen, à Paris, sur l'initiative de Jean Arp. Michel Seuphor dessinait depuis longtemps, mais c'est à partir de cette période qu'il a vraiment trouvé son style particulier des dessins "à lacunes", caractéristique d'une grande rigueur liée à une profonde sensibilité.

Il n'est plus possible, à partir de cette date, de donner en peu de mots, les étapes de sa carrière. Ecrits, conférences, organisation d'expositions, expositions personnelles, tant en Europe qu'aux USA, se sont succédées. En 1965, il acquiert la nationalité française.

Le Musée des Beaux-Arts de Nantes a présenté la première rétrospective de son oeuvre plastique en 1966, oeuvre consacrée en 1977 par une importante exposition au Centre Georges Pompidou. Un grand nombre de musées possèdent des dessins de Michel Seuphor.

En 1985, l'Université de Nantes a organisé un Colloque International sur sa création littéraire, colloque accompagné par une nouvelle exposition au Musée des Beaux-Arts de la ville.

Par la suite, la Belgique, l’Allemagne, l’Espagne… ont rendu et continuent à rendre des hommages au poète et plasticien Seuphor, le plaçant parmi les grands précurseurs du siècle.

"Grand merci pour votre lettre, cher ami, et pour l'annonce de votre promotion! Vous sortez de votre coquille enfin et exposez aux Réalités Nouvelles! Tous mes voeux! Cela aurait dû arriver plus tôt, beaucoup plus tôt. Mais voilà qui est réglé. Vous êtes artiste depuis toujours et ne vouliez pas qu'on le sache. Le protecteur et le commentateur des ouvriers du pinceau a bien le droit d'être leur semblable, sans être un imitateur. Je vous salue comme artiste créateur, entrant dans le secteur géométrique qui est le vôtre..."


LETTRE DE BERNARD NOEL DU 11 JUIN 1996

Né à Londres en 1921 de parents grecs, John Christoforou a étudié à l’Ecole des Beaux-Arts d’Athènes. Après avoir vécu à Londres, il se fixe à Paris en 1957.

Christoforou est l’un des grands précurseurs de la « Nouvelle figuration » et fait partie de ce petit nombre de peintres expressionnistes figuratifs qui se sont révélés depuis la guerre.


JOHN CHRISTOFOROU - UNE HUMANITE DESTABILISEE (Gérard Xuriguera. 1993)

"Produit d'une société, l'art ne saurait être envisagé hors de son contexte légitimateur. Qu'il accepte ou récuse cette société, l'artiste est immanquablement livré à ses contradictions, à ses fallacieux avantages et à son absurdité.

Bien qu'il occupe une situation farouchement indépendante dans l'écheveau des courants esthétiques de la dernière post-guerre, John Christoforou n'a pas échappé à l'emprise de son époque, à ses horizons troublés et à sa fibre affective blessée, au sortir du second conflit mondial vécu sur le terrain.

On aura compris qu'il n'a pas choisi les chemins usés des séductions épidermiques pour exhaler son désarroi, mais le registre dévastateur des perturbations organiques. Il affronte ainsi brutalement la figure, la dépouillant de ses scories, afin d'en arracher la douloureuse quintessence, selon les inclinations de sa subjectivité. Face au désordre d'un monde tragique et dérisoire qu'il refuse et entend prévenir de ses égarements, il a recours à l'analogie pour instruire son réquisitoire corrosif.

Peignant ce qu'il ressent à l'intérieur de lui-même et ce qu'il a vécu, il bouscule rageusement ses personnages, lacère et distord leurs configurations, jusqu'à l'anéantissement de leur ressemblance. Ce faisant, se nouent une suite d'équivalences, qui s'imposent bientôt comme les archétypes d'un langage. Un langage à la véhémence souvent paroxystique, dont le sens réside davantage dans la partie cachée que dans la partie émergée...


...Tu es un abstrait sensible et lumineux, ce qui met beaucoup de concret dans ce qui passe pour son contraire...

LETTRE DE GEORGES COPPEL DU 26 MAI 1998

Le texte de Bernard Noël est exemplaire : la précision des mots lui a permis d’exprimer des idées subtiles et rares. Malgré son talent, Bernard Noël n’aurait pas réussi aussi bien s’il n’avait pas aimé et compris votre démarche artistique. Il en résulte un texte qui vous expose (explique) et le dévoile. Car son habileté de poète est si grande qu’il pourrait facilement se camoufler derrière des mots harmonieux… s’il était moins honnête. Ce mélange d’honnêteté, de talents et d’intelligence fait de Bernard Noël un être isolé dans le monde de la critique d’art. Bref l’artiste exposé et son présentateur sont bien assortis…


LETTRE DE JOHN CHRISTOFOROU DU 14 AVRIL 1998

Effectivement, on reconnaît qu’il n’y a pas d’art sans géométrie.

J’ai bien aimé, parmi d’autres œuvres dans la plaquette, ces formes rouges, si bien structurées, comme des idoles hiératiques d’une religion animiste…


LETTRE DOLIVIER DEBRE DU 28 MAI 1998

La construction de ton œuvre, qui est très forte et à l’opposé de la souplesse informelle de ma peinture, m’intéresse beaucoup. Je te félicite également pour ton texte que j’ai lu avec grand intérêt.


LETTRE DE MARTINE MORILLON-CARREAU DU 29 OCTOBRE 2009

… Nous avons retrouvé avec joie les aspects de ton travail que nous connaissions (c'était aussi très joyeux et plein de rêve ta première manière très colorée de peintre admirateur de Klee) mais découvert avec intérêt tes dessins et ton œuvre de graveur, que nous ignorions. Quant à Antares c'est un magnifique musée virtuel, à l'impeccable accrochage en des salles idéalement distribuées (et puis, moi, ce que j'aime dans un musée réel, c'est être seule devant les oeuvres exposées pour me promener devant elles en ayant l'impression que le musée n'est ouvert que pour moi, alors) ! J'ai aussi beaucoup apprécié les reflets des œuvres sur le sol de marbre ! Et puis les deux sculptures d'accueil à l'entrée du musée me font penser, je ne sais pourquoi et malgré leur radicale abstraction, à un homme et une femme, et je les ai en moi-même nommées Jean et Jeannette... souvenir de Convergence oblige.

COURRIER D’YVES COSSON DU 20 JANVIER 2011

… cher Jean, je suis allé, avec grande peine, car le vieux a des problèmes de propulsion, admirer votre grande exposition (Université Permanente de Nantes). Moi, le vieux poète. Je vous remercie de m’avoir fait rêver avec vous des « mondes imaginaires » et d’admirer ces « structures » magiques car vous montrez avec quel brio que ce monde est structuré et que l’harmonie est mathématique aux antipodes des surréalistes qui « déconstruisent » toute vue et toute vision.